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ARNAUD (G.). Le Salaire de la peur. Paris, Julliard, 1950, in-12, broché, couverture.

ÉDITION ORIGINALE.

L'existence de Georges Arnaud (1917-1987) ressemble à un volume de la Série Noire. Il est impliqué, à l'âge de 24 ans, dans un sordide fait divers familial : l'assassinat de son père, de sa tante et d'une domestique, tués à coups de serpe, dans leur demeure du Périgord. Suspect idéal et seul survivant du massacre, il purge dix-neuf mois de prison avant d'être acquitté au terme d'un procès retentissant. L'affaire ne sera jamais élucidée. Il fuit alors la France et s'installe en Amérique latine où il mène une vie d'aventurier ; il exerce mille métiers, devenant tour à tout chercheur d'or, barman et camionneur. Son exil vénézuélien lui fournira la matière de son premier roman, Le Salaire de la peur (Julliard, 1950). « Petit frère de Cendrars et de Darien », Georges Arnaud retrace le destin tragique de quatre hommes chargés d'une mission à haut risque : il s'agit de convoyer 400 kg de nitroglycérine, à bord d'un camion de fortune et sur des routes défoncées, pour aller éteindre l'incendie d'un puits de pétrole. Le texte brille par son efficacité narrative. Un solide suspense sous-tend ce récit qu'on lit d'une traite tant la peur est palpable, chevillée au corps du chauffeur comme à celui du lecteur.
Le roman connaît un succès immédiat qui sera amplifié, trois ans plus tard, par la célèbre adaptation cinématographique de Clouzot, avec Yves Montand et Charles Vanel dans les deux rôles principaux. Palme d'or à Cannes et Ours d'or à Berlin, le film est devenu un classique du cinéma français. Il convient de noter qu'Hitchcock avait songé, un temps, à porter Le Salaire de la peur à l'écran, mais à l'inverse du roman, avec un dénouement heureux ; ce projet ne vit jamais le jour.
L'œuvre littéraire et la personnalité trouble de Georges Arnaud ont suscité, ces derniers temps, un regain d'intérêt. Dans La Serpe (Julliard, 2017), couronnée par le prix Femina, Philippe Jaenada a consacré plus de 600 pages à l'auteur du Salaire de la peur. Les éditions Julliard ont récemment réuni, en un volume, les trois « romans américains » de Georges Arnaud.

Exemplaire du service de presse, enrichi d'un bel envoi autographe de l'auteur à Michel Audiard :

À Michel Audiard,
qui est tout compte fait
mon compagnon de bagne
et d'écurie
Bien amicalement
Georges Arnaud

Écrivain, scénariste et éminent dialoguiste du cinéma français des années soixante, Michel Audiard est notamment l'auteur des inoubliables répliques du Cave se rebiffe (1961), d'Un singe en hiver (1962) et, bien sûr, des Tontons flingueurs (1963). Il signa ses premiers romans, au Fleuve noir, au début des années cinquante, en même temps que ses premiers dialogues. Audiard et Arnaud appartenaient alors à la fameuse bande bohème de l'Île Saint-Louis, qui réunissait nombre d'artistes, d'écrivains et de cinéastes. Leur amitié et les liens solides qu'ils nouèrent datent de cette époque. L'expression « compagnon de bagne et d'écurie » est sans doute imagée : une métaphore pour traduire les difficultés de l'écriture et le fait qu'ils côtoyaient les mêmes amis. Quant au « tout compte fait » de la dédicace, il est en revanche à prendre au sens propre : Audiard et Arnaud partageaient en effet, pour le cinéma et l'édition, le même agent littéraire, Jean Birgé.

L'exemplaire est préservé dans une boîte à rabats de Julie Nadot.

Dimensions : 186 x 119 mm.

Provenance : Michel Audiard, avec son ex-libris.

 

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Illustrations

  • ARNAUD (G.).
  • ARNAUD (G.).